Logo_PK_V3d

Le zone system d’Ansel Adams

pkb_zone-system-ansel-adams-img000

Qu’est-ce que le zone system d’Ansel Adams ?

C’est un système de mesure de la lumière, inventé à la fin des années 30 par le célèbre photographe paysagiste américain Ansel Adams, qui lui permettait de faciliter le travail postérieur de tirage en chambre noire (labo ou PT) et d’améliorer le rendu de la réalité (voir article sur les photographes américains).

Il l’a appelé zone system. Et plus tard on a conservé son nom d’origine dans le monde entier, en y ajoutant celui de son inventeur.

Ayant constaté que le contraste lumineux dans la réalité est plus important que celui qui peut être enregistré par une surface sensible, Ansel Adams a établi qu’il suffisait d’enregistrer un écart de 10 valeurs de diaphragme. Il les a numérotées de 0 à 9.

 

Les teintes sont celles du rendu positif sur papier.

La zone 5 est celle du gris moyen, celui de la charte grise (*1) – le gris qui renvoie 18% de la lumière, ce qui est la moyenne de la lumière réfléchie sur notre douce planète.

Chaque zone correspond au double de lumière de la zone précédente, ce qui correspond à un diaphragme ou un IL (Indice de Lumination)

Seules les zones 3 à 7 contiennent des détails reproductibles sur un tirage papier quand on expose (*2) pour la zone 5. On constate donc qu’il y a deux zones de part et d’autre du gris moyen, c’est à dire deux diaphragmes, dans lesquelles on aura du détail.

C’est la zone 5 qui est la zone de référence du système.

 

Une photo valant mieux que cent explications :

Illustration pratique des zones sur une photo.
Illustration pratique des zones sur une photo.

 

Concrètement, qu’est-ce que cela donne ?

Point de départ : Vous avez mesuré la lumière dans la zone que vous avez choisie, avec une cellule spot (tous les boîtiers Pentax donnent cette possibilité). Cette cellule est faite pour mesurer précisément la lumière là où on lui dit de la mesurer, fidèlement, mais bêtement.

La cellule fournit une exposition correcte pour la zone 5. Vous devrez décaler cette exposition de la différence en IL (ou F/Stop) entre votre zone sur l’échelle de gris et le résultat de la cellule (zone 5).

Si vous avez mesuré votre lumière sur une zone 3, vous devrez donc fermer de 2 crans votre exposition, c’est à dire de 2 diaphs, ou de 2 vitesses ou de 2 niveaux d’Isos, pour que la photo ne soit pas surex.

Vous imaginez immédiatement que cette pratique ne va pas être rapide !

Pour être efficace, cette méthode exige que vous appréciiez bien les niveaux de gris. Ce qui nécessite une certaine pratique, ou plutôt une pratique certaine.

AE & AF liés. AF sur les arbres. f:5,6-1/200-200isos
Æ & AF liés. AF sur les arbres. f:5,6 – 1/200 – 200Isos

 

AE &AF liés. AF sur le balcon au premier plan. f:5,6-1/160-100Isos
Æ & AF liés. AF sur le balcon au premier plan. f:5,6 – 1/160 – 100Isos

 

AE & AF liés. AS sur façadeclaire- f:5,6-1/250-100Isos.
AE & AF liés. AF sur façade claire- f:5,6-1/250-100Isos.

 

AE &AF liés. AF sur le ciel. f:5,6-1/320-100Isos
Æ & AF liés. AF sur le ciel. f:5,6 – 1/320 – 100Isos

 

Dans cet exemple, paysage urbain peu contrasté en apparence (en fait 1,5 IL), distinguer les différentes zones n’est pas très évident. Les arbres (photo 1) sont en zone 5, le balcon du premier plan (photo 2) est en zone 6, la façade ocre clair (photo 3) et le ciel (photo 4) sont en zone 7, à 1/3 d’IL près. Ce qui n’est pas prévu dans le zone system.

Nota. C’est la photo 1 qui est la plus proche de la réalité. Sauf pour le ciel sous-contrasté – recours au PT nécessaire.

 

Le réglage fin est beaucoup plus facile avec le numérique qu’il ne l’était avec l’argentique. Les boîtiers actuels offrant des niveaux de vitesse et de diaphragme d’un tiers de valeur. Même chose pour les Isos. Maîtriser parfaitement le zone system  paraît quand même bien compliqué. On peut donc se poser la question.

 

A-t-on besoin du zone system avec le numérique ?

La photographie a bien changé depuis les années 30. Mais pas la lumière ni les contrastes. Certains phénomènes ont changé de nom. On ne parle plus de la latitude de pose des émulsions, on parle de la dynamique des capteurs. C’est pourtant la même chose. La mesure de la lumière reste un moment central de la prise de vue.

Arrêtons-nous un instant sur la mise en pratique du système d’Ansel Adams.

  1. Si vous exposez pour le gris moyen – zone 5, vous obtiendrez une exposition parfaite puisque c’est celle de la réflexion moyenne de la lumière (*2), et donc une photographie équilibrée, avec des valeurs allant de 3 à 7.
  2. Si vous voulez privilégier une partie sombre de votre photo, par exemple en zone 3, vous allez exposer pour le 3. Votre photo ira de 1 à 5 : les parties sombres de votre photo seront bien exposées et détaillées, les zones claires seront plus claires de 1 et 2 IL, voire surex. Votre photo sera globalement claire.
  3. Si, par contre, vous privilégiez une partie claire, par exemple en zone 7, vous allez exposer pour le 7. Votre photo ira du 5 au 9 : les parties claires seront bien exposées et détaillées. Les parties sombres seront plus sombres de 1à 2 IL, voire sous-ex. Votre photo sera globalement sombre.

L’exposition correspond chaque fois à ce que vous vouliez obtenir, puisque vous avez choisi l’endroit de la photo que vous vouliez privilégier. Vous aurez des photos plus contrastées que dans le premier cas. Mais vous pourrez avoir à corriger le contraste. Car le contraste est irréductible. Le numérique permet en JPEG de paramétrer l’atténuation de ce contraste. Mais en RAW, vous aurez un fichier brut qui contient toutes les indications, et plus riche chromatiquement. À charge pour vous de post-traiter ce fichier.

 

(*1) par exposer pour une zone, il faut entendre choisir les paramètres d’exposition qui correspondent à cette zone, voir le tableau 2.

(*2) Nos cellules TTL mesurent la lumière réfléchie.

 

Le travail de Post Traitement

Dans le cas 1, pas grand-chose à faire. Vouloir créer du contraste est toujours possible, mais pourquoi ne pas le faire à la prise de vue ?

Dans le cas 2, vous allez assombrir les hautes lumières, les pousser (terme de labo argentique) en faisant de l’accentuation inverse au moyen du curseur hautes lumières (vers la gauche). Attention cette manœuvre peut faire apparaître des nuances gris métal dans les ciels.

Dans le cas 3, vous allez éclaircir les ombres (en labo argentique on les retenait) en faisant de l’accentuation inverse (encore) au moyen du curseur ombres ou/et teintes sombres (vers la droite).

Le travail est comparable à celui du labo argentique. Il est simplement beaucoup plus facile, réversible, immédiatement visible, donc dosable de façon précise. Et, cerise sur le gâteau, il peut être interrompu en cours de route, et repris plus tard.

Dernier avantage, ce type de résultat peut être obtenu de différentes manières :

  • exposition – influe de manière égale sur toute la photo
  • ombres – hautes lumières – influent seulement sur les ombres ou les hautes lumières
  • clarté – éclaire les zones claires, mais assombrit en même temps d’autres zones. À manipuler avec retenue.
  • contraste – assombrit notablement les zones déjà sombres.

Toutes les indications concernant les modifications correspondent au logiciel Lr. (Lightroom)

Ce travail et ses possibilités sont comme un parachute qui assure la sécurité d’un résultat correct, si la PdV (prise de vue) a été hasardeuse. Il permettrait éventuellement d’obtenir devant son ordinateur les mêmes résultats que l’usage du zone system.

Notez bien qu’en cas de scène à fort contraste, vous ne pourrez guère échapper au Post Traitement. Sauf à shooter en Jpeg avec paramétrage des compensations hautes lumière et ombres. (Menu : boîtier-2-5)

Mais

Tout d’abord certains photographes ne veulent pas post-traiter leurs photos. De même qu’une majorité de photographes de l’époque argentique n’avaient pas de labo photo et bien sûr peu ou pas de pratique du labo. Ensuite, utiliser le zone system à la prise de vue permet d’obtenir immédiatement un résultat qui correspond – éventuellement imparfaitement – à votre désir. Et c’est là que le numérique vient à la rescousse du photographe, en cas d’insatisfaction, il est possible de modifier les paramètres de PdV pour obtenir le résultat souhaité… et de s’améliorer.

 

Quels outils pour utiliser le zone system ?

Pour cela il faut des outils permettant de mesurer la lumière à l’endroit de son choix.

Ce qui exclut totalement la mesure centrale pondérée et également la mesure multizone. En effet, ces deux modes mesurent la lumière sur toute la photo et proposent un choix assurant une photo équilibrée, produit d’un compromis. Donc pas du tout ce que nous envisageons.

La mesure spot semble bien convenir. Toutefois, nous la déconseillons, car elle ne tient compte que de la mesure au point choisi, ce qui exige de le choisir avec beaucoup de soin. La moindre erreur de choix quant à la zone à laquelle appartient ce point peut conduire à une photo complètement surex ou sous-ex. La justesse de ce choix est le fruit d’une riche expérience sur ce plan, de beaucoup de pratique. À ce premier problème s’en ajoute un autre ; la taille des collimateurs d’aide à la mesure de l’AE ne permet pas toujours la précision souhaitable pour être sûr que la mesure soit correcte. Plus spécialement dans les cas d’emploi d’objectifs à focales courtes pour des paysages lointains où les détails sont petits et de ce fait pas toujours faciles à viser avec suffisamment de précision.

La solution (une solution en tous cas) nous paraît donc être l’usage de la mesure multizone avec l’AF et l’AE liés. Cette mesure conserve les avantages de la mesure multizones et introduit une influence de la zone, pour laquelle on décider de « faire l’exposition ». Elle impose de recadrer après avoir fait le point et de conserver L’AE faite à cet endroit. Quand on n’a pas besoin de dissocier la mesure de l’AE de celle de l’AF, tout roule. Si l’on veut faire l’AE en un point et l’AF dans un autre, se situant à une distance différente, il faut alors mesure l’AE avec le bouton AE.L, ce qui fige l’AE, puis recadrer, faire l’AF sur le point voulu et déclencher.

C’est évidemment peu compatible avec la photo instantanée, mais plus rapide que la méthode décrite plus haut, fidèle à la pratique du maître américain. Mais Ansel Adams pratiquait peu la photographie instantanée, lui qui travaillait au pied avec une chambre généralement supérieure à 4 x 5 inches (~13×18 cm). Dans les années 50 il utilisait des chambres plus « petites » genre Graflex ou Linhof, avec bien sûr une cellule à main Weston.

 

L’adaptation à la couleur

De toute évidence Adams, au cours de son travail au labo, avait habitué son œil à voir les valeurs de gris des 10 zones. Il les voyait dans les couleurs des paysages fantastiques de Yosemite Valley et leurs densités. Et ça lui facilitait le travail de tirage et donnait à ses photos une palette de gris impressionnante.

Pentax, qui a doté ses boîtiers de la possibilité de lier la mesure de l’AE au point de l‘AF, ne l’a pas fait par hasard. La référence au zone system d’Ansel Adams n’est pas explicite, mais peu importe, profitons-en.

Avec un peu d’habitude on arrive à trouver ces valeurs dans ce que l’on va photographier, peut-être pas avec autant de précision qu’Adams, mais on ne consacre plus jamais autant de temps à régler notre matériel avant chaque déclenchement. Les temps ont vraiment changé.

Les appareils actuels proposent 3 modes de mesure : Centrale pondérée, multi-zone et spot. Les différentes variantes de la mesure multi-zones tirent leur épingle du jeu dans la grande majorité des cas.

Mais « penser sa photo dans l’esprit du zone system » permet de saisir l’essence de la mesure de lumière. Cette mesure de la lumière est le départ de toute la démarche photographique. Comprendre la pensée qui a fondé ce « system », c’est se donner plus de liberté dans la pratique de la photographie. Et ce, quel que soit le mode de mesure que l’on choisit. Enfin dernière remarque, mais pas la moins importante : Le zone system d’Ansel Adams n’a pas été pensé pour supprimer le travail en laboratoire, mais pour le faciliter, en rendant le résultat pour la zone choisie aisé à obtenir. Ce qui signifie la même chose pour le numérique : cela ne supprime pas le PT,

 

Une fois n’est pas coutume, en guise de conclusion …

Nous vous proposons un jeu : voici une photo couleur avec des marques sur certaines zones. Pouvez-vous indiquer le numéro de ces zones ?

Zone System. Autotraining en couleurs
Zone System. Autotraining en couleurs

 

Réglette des valeurs des zonesRéglette des valeurs des zones
Réglette des valeurs des zones

 

Zone System - autotraining antisèche N&B.
Zone System – autotraining – antisèche N&B.

 

Selon votre score de bonnes réponses, vous aurez droit à :

  •  6 bonnes réponses : Notre très haute considération
  •  5 bonnes réponses : Notre profonde considération
  •  4 bonnes réponses : Notre considération
  •  3 bonnes réponses : Notre plus grand respect
  •  2 bonnes réponses : Notre grand respect
  • Tout score inférieur : Notre profond respect pour avoir lu cet article jusqu’au bout. Tout score supérieur : Nous restons sans voix …

Vous aurez bien sûr remarqué que le nombre de récompenses correspond au nombre de zones qui restent détaillées sur un tirage papier en N & B. Bien sûr…

PS : Un truc pour se faciliter la tâche. Faites une copie d’écran de la réglette avec les zones. Sauvegardez-la. Ensuite, ouvrez-la, faites en sorte que les zones grises soient au bord de votre image. Et vous la promenez sur l’image, dont vous voulez déterminer les zones, de façon à ajuster la bonne zone de la réglette sur la zone choisie de votre photo. Un autre truc consiste à travailler en RAW+ et à paramétrer le cliché Jpeg du slot 2 en N & B pour pouvoir identifier les zones grâce au truc précédent. Une fois le niveau souhaité de familiarité avec le zone system, on peut revenir au RAW seul. Ou pas.

La réponse - (Cliquer)
Le zone system - Autotraining - Réponses
Le zone system – Autotraining – Réponses

 

(*1) Inventée par Kodak

(*2) Exposer pour une zone signifie : mesurer et choisir les paramètres de l’exposition pour rendre correctement cette zone. Exemple : On peut exposer pour les basses lumières, c’est à dire pour bien rendre ces basses lumières de façon générale.

 

Une réponse

  1. 2 bonnes réponses ! Vive le numérique et la possibilité de recommencer la prise directement 🙂
    Comme vous l’écrivez, les temps ont vraiment changé. Même s’il m’arrive parfois de me tester en travaillant en mode M sans utiliser le petit bouton vert, il faut avouer que la mesure multi-zone et le raw facilitent grandement le travail. Je repenserai néanmoins à cette méthode lors de ma prochaine sortie. Juste pour le plaisir de prendre le temps de faire les choses que l’on aime faire.

Les commentaires sont fermés.